| Saint-Simon sous chapiteau
Bergounioux/Sollers, ce n'est pas le même combat.
La table ronde m'avait bien sûr attiré (Autobiographie : fiction ou vérité) mais j'avoue que j'avais bondi en lisant que les participants étaient Pierre Bergounioux et
Philippe Sollers, avec deux écrivains suisses que je ne connaissais pas.
Était-ce possible que Bergounioux vienne aussi près de chez moi, un samedi après-midi ?
Oui, c'était bien écrit : Fête du livre à La Ferté-Vidame, remise du prix Saint-Simon à Philippe Sollers etc...
Je me
méfiais, car une fois déjà, à la Ferté-Vidame, ils avaient annoncé François Bon et qui n'était pas venu, les ayant
prévenus pourtant qu'il ne viendrait pas...
Bergounioux à 37 km ce samedi après-midi, vraiment, je ne vois pas qui aurait été capable de m'empêcher d'y aller !
L'animateur Jean Lebrun, le célèbre
chef de chantier la voix au timbre si reconnaissable, toujours aussi à l'aise, toujours rebondissant malgré un débat non préparé,
capturé par le clown vedette Sollers, très en forme à la sortie du repas...fit ce qu'il put comme d'habitude. Il ne connaissait de Bergounioux que les quelques banalités maintes fois écrites à son propos, et de Sollers que ses facéties.
Bien mal lui prit à un certain moment d'essayer de faire parler Pierre Bergounioux de sexe et autres excitations.
Il se ramassa en beauté après quelques réponses aussi brèves que sèches,
et repassa la main à Sollers.
On appréciera et comprendra les non-dits,
le calme de l'un, l'excitation de l'autre. Une dernière précision : sur certaines photos,
Sollers semble me regarder. Il n'en est rien. C'est que j'étais assis au premier rang,
à la droite de Julia Kristeva, et que très souvent il regarde, complice, cherchant parfois de voir
sa réaction, d'autres fois suscitant son assentiment.
Sollers : " Le meilleur de Martin du Gard, c'est André Gide ".
Rires assurés. Clin d'oeil à Julia, un petit coup de flotte...Et j'en ressors une dans 3 minutes.
Pierre Bergounioux sourit mais ne dit rien. Il répond juste aux questions qu'on lui pose.
J'avais rencontré Pierre Bergounioux peu avant cette table ronde, et dès finie, sommes allés
nous désaltérer avec Catherine B, et Sandrine H. coupable de ces photos :
Pendant ce temps-là, la fête bat son plein, aussi bien à l'extérieur
(Julia Kristeva parle sous une tente de Sainte Thérèse d'Avila,
évidemment), qu'à
l'intérieur, où les écrivains attendent le lecteur et la dédicace ("
C'est quoi votre prénom ? " est à 80 % la
première
question posée par l'auteur). Je suis triste pour ceux qui n'ont personne depuis deux heures, alors que dès annoncé,
s'allonge une file de 20 personnes qui attendent, devinez qui...
Pierre Bergounioux est étonné quand je lui dis qu'il a un emplacement réservé, qu'il décide de laisser vide,
ce qui n'empêche pas que des gens trouveront notre refuge et lui demanderont des dédicaces,
occasion pour moi de voir que le comportement de certains est assez singulier,
voire étonnant ou carrément stupéfiant parfois...
Courageux Pierre B., acceptant toutes les questions,
y répondant du mieux qu'il peut, avec une patience
qui m'étonne mais que je comprends...
Je regrette l'absence de
Georges Poisson, que je salue chaque année en
évoquant
Claire. J'espère qu'il n'est pas malade.
Je ne raconterai bien sûr pas tout ce que nous nous sommes dit, et combien c'était comme
si nous connaissions depuis 1973 où nous avons déjeuné ensemble pendant un an
chaque jour au restaurant de l'ENS de Saint-Cloud.
Un vent violent s'est levé vers 17 heures et il a commencé à
faire froid. Nous nous sommes séparés, chacun devant prendre la route pour rentrer chez soi.
Le chapiteau de cirque dressé dans le parc (un vrai chapiteau, rouge et bleu) estt bourré de monde.
C'est l'heure Sollers, où devant les pontes du coin, sarkosystes en diable pour la plupart, et ceux de Paris,
il fait un numéro exceptionnel de clown génial sur Saint-Simon.
Vraiment,
La Grand messe !
Je défie quiconque qui ne connaissait pas Saint-Simon avant cette conférence sortir sans avoir envie d'acheter
les Mémoires
(sinon les consulter
en ligne ) et d'en lire, comme beaucoup font,
quelques passages, au hasard, de temps en temps, pour connaître et reconnaître et se délecter au passage du génie
de la langue française.
Car Sollers, aussi insupportable puisse-t-il être,
en particulier à la télévision, connaît ses textes. Spectacle de cirque certes, qui en fit fuir d'ailleurs
quelques-uns, j'en ai vu sortir excédés et outrés, (il faut dire que le gouvernement actuel et ses " guignols"
en ont pris
pour leur grade), mais de qualité quant à son contenu.
Brillant exercice d'érudition mise à la
portée de tous, ce n'est pas tous les jours. Mais pas seulement brillant.
Subtil, drôle, acéré mais juste, même si la mise en voix était parfois facile et exagérée, allant du suspense, du dramatique au burlesque, sans hésiter à se faire le bouffon de la langue.
Le même Sollers qui deux heures plus tôt dans la cour du château avait hurlé dans le micro
(apprenant que Le Roy Ladurie allait commencer une table ronde) "
Ah ! ben alors si le roi est là,
alors tout va bien", avant d'entamer, kidnappant le micro au pauvre Lebrun un peu dépassé, je vous jure que c'est vrai, une imitation du Général de Gaulle.
Ceux qui en doutent peuvent m'en demander la vidéo.
On paierait cher aussi pour lire
Comment Saint-Simon liquiderait en trois phrases et huit adjectifs un type comme Sollers, capable d'aller
baiser les mules du pape...(même ayant expliqué au début de la table ronde, qu'il y avait 3 sortes
de catholicisme, et que lui était un
catholique italien !)
Bref, une journée formidable.
Ça fait du bien.
Je n'en garderai bien sûr que la rencontre de Pierre Bergounioux et Catherine B.