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Dimanche 9 décembre 2007 | jour précédent | jour suivant | retour au menu |
Dans le Bestiaire de Bergounioux je demande................
....................(Les bergouniennes) la vandoise. (bergounienne no 18) C'était un des jeux avec lequel j'aimais jouer avec mes frères et auquel j'ai repensé dimanche dernier en voyant mes filles y jouer avec un réel plaisir découvrant par là qu'on y jouait encore. 7 familles de 6 cartes = 42 cartes. Je pensais que cela serait intéressant d'essayer d'approcher quelqu'un, une oeuvre, ou soi-même, en choisissant les sept familles et les six cartes (maîtresses bien sûr) de chacune . Je pensais aussitôt à Pierre Bergounioux, allez savoir pourquoi ! Je ne révèlerai pas toutes les familles ni les cartes aujourd'hui (bien que plusieurs soient faites et les autres prévues, la liste restant quand même modulable au fil du temps et des futurs livres), mais je peux déjà vous montrer le jeu dans sa boite et un exemple de carte et de famille. |
Pour ceux qui voudraient
les imprimer et se constituer le jeu en vrai, et pourquoi pas y jouer avec leurs enfants,
(j'en indiquerai plus tard, quelques règles très particulières par rapport au jeu de notre enfance), la taille réelle de chaque carte est de 5,7 cm de large sur 10 cm en hauteur. Le dos est blanc avec le dessin de Cueco présent sur la couverture de l'Empreinte, et j'ai déjà dit en quoi je le trouve très significatif de l'œuvre de Pierre Bergounioux (bergounienne no 15). Les faces seront d'une couleur différente correspondant aux sept familles différentes, afin de bien les distinguer, cartes en main, comme cela se fait dans les jeux habituels. Ainsi, la famille d'aujourd'hui, Le Bestiaire (sous-entendu : de Bergounioux), a pour cadre un cadre vert, du même vert que le dessin de Cueco. |
Quand on dit Bestiaire de Bergounioux, il est difficile de ne pas penser aussitôt
aux Poissons et en particulier à la Truite. On se souvient de La Ligne (Verdier, 1997): La truite, c'est compliqué. il est posssible que les trois ou quatre mille volumes qui lui ont été en partie ou en totalité consacrés n'en donnent qu'une idée fort imparfaite, encore. Sa défiance est légendaire. Son énergie "esmerveille" déjà Belon qui en décrit l'anatomie dès 1955 dans La Nature et la diversité des poissons."(p.65) Bergounioux connaît ses classiques. Dans cet ouvrage (dont le titre complet est "La nature et la diversité des poissons, avec leur description et naïfs portraits", Pierre Belon, né en 1517, et mort de façon mystérieuse, sans doute assassiné par un rôdeur, en avril 1564, alors qu'il traversait le Bois de Boulogne), le célèbre apothicaire de l'évêque du Mans puis du cardinal de Tournon à Paris, mais heureusement pour nous, aussi naturaliste et grand voyageur, décrit en effet quelques centaines de poissons avec des gravures exceptionnelles de justesse pour l'époque. On peut en voir, sur le site de l'Université de Nantes, des exemplaires étonnants. Bergounioux préfère la vision de la truite par un autre naturaliste français (en fait photographe), né dans la Sarthe, comme Belon, un peu plus tard, en 1821, Henri de la Blanchère (de son nom complet : Pierre René Marie Henri Moulin du Coudray de La Blanchère), dans son livre Dictionnaire général des pêches, publié la première fois en 1868 chez Delagrave. Cet ancien garde forestier, fut un un des premiers savants français à appliquer la photographie à ses recherches d'histoire naturelle. Bergounioux apprécie son travail (mais l'appelle Blachère, à moins que ce ne soit une faute de l'imprimeur): "[...]Henri de la Blachère, par exemple, auteur, au siècle passé, d'un très bon Dictionnaire général des pêches, on a quelque chance de rencontrer sous sa plume quelque chose qui ressemble à la réalité. Il est le seul à considérer la truite comme une créature inélégante, trapue, à tête lourde, à queue carrée, l'ai féroce et l'oeil mauvais. Voilà ce que livre l'examen impartial des gravures sur acier qui ornent les ouvrages d'histoire naturelle ou du panier d'osier, quand tout est fini." (p.65-66). Les pages consacrées à la pêche à la truite ne sont pas rares chez Bergounioux et les Carnets de notes auraient pu fournir des dizaines de partie de pêche. On aurait donc pu choisir la truite pour notre carte. MAIS j'en ai choisi un autre, moins connu : la vandoise. Pourquoi ? Parce que ce poisson est celui d'une scène emblématique, aussi capitale que traumatisante et dont Bergounioux se rappellera toute sa vie, et qui est rappelée à plusieurs reprises et endroits de son oeuvre. La scène est racontée à la fin de La Ligne, des pages 69 à 73. Il faut la lire intégralement pour en connaître tout le non-dit, la rancoeur et le drame qui s'y jouent, entre lui et son père, et c'est la raison pour laquelle je ne la citerai pas. Découvrez-là. On a tous une scène traumatisante dans notre jeunesse comme celle-ci, à laquelle on repensera jusqu'à sa mort, la revivant impuissant à chaque fois qu'elle ressurgira dans notre pensée, plus réelle et pénible que jamais. Je ne parlerai donc que de ce poisson-là : la vandoise. " j'avais observé, lorsque découragé, j'allais l'attendre sur la rive, que de grands poissons blancs évoluaient en surface autour de la barque, impunément, car il pêchait les profondeurs." (p.70) "[...] C'est par un après-midi de cette sorte que je l'ai entrepris. Je lui ai demandé de me conduire au coude que formait la rivière parce que je me croyais capable de prendre les grandes vandoises - ça vient, dit-on, du gaulois vendesa, où ça voulait dire blanc- qui se pavanaient à fleur d'eau " (p.70) " [...]Les vandoises étaient là. elles faisaient des ronds au soleil, exhibaient d'indolentes nageoires, se croyaient hors d'atteinte, au-dessus de tout et le montraient avec obstentation. On a été à portée[...]" (p.72) Je ne dirai donc rien de la suite. Il faut lire, pour en ressortir meurtri. Vous croyez qu'il n'est pas arrivé à en prendre une seule ? Vous vous trompez. La vandoise est un cyprinidé, qu'on appelle aussi selon les endroits, les époques ou les documents, dard, meunier argenté, sieje, rouzau, poinonet, gandoise, coucie. Son nom latin donné par Linné, Leuciscus leuciscus (nom de genre avec une majuscule, nom d'espèce avec une minuscule, comme je n'arrête pas de le répéter aux élèves, qui n'en voient pas l'importance et qui s'en f... ) Mais ce n'est pas cette image-là que je mets sur la carte. En effet, dans un autre livre de Pierre Belon, consultable en ligne page par page, De aquatilibus. apud Carolum Stephanum publié en 1553, la vandoise est décrite, page 313 et 314. |
La carte Vandoise de la famille du Bestiaire(de Bergounioux) est donc celle-ci. Si avec cette gravure quelqu'un peut faire mieux, qu'il n'hésite pas à lancer sa ligne. Je ne prendrais pas la mouche. D'aucuns penseront que j'aurais pu penser aux Insectes. C'est fait. Mais devinez lequel ce sera. |