Journal de Nogent le Rotrou
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ma vie dans le Perche
Propos sur la littérature et la peinture.
jeudi 9 novembre 2006 jour précédent jour suivant retour au menu
Dans le brouillard eurélien
Du côté de Bailleau-le-Pin ...

C'était hier, j'allais à Chartres faire un examen de santé assez lourd.
Je roulais lentement sur la route départementale, tranquille et déserte, au moment exact où la photo apparaît dans son bain de révélateur.
Je regardais le ciel de Bailleau-le-Pin sans penser à rien, un ciel blanc nuancé de nuages gris aux reflets verdâtres, un de ces ciels de vent courts et immobiles de la peinture normande, je regardais le ciel de Bailleau-le-Pin au-dessus du silo à grain le matin du 8 novembre 2006, et j'éprouvais avec une intensité poignante le sentiment d'être là, simplement là, devant le silo à grain de Bailleau-le-Pin, le matin de mon épreuve d'effort à l'Hôpital de Chartres.
Sans doute ne fut-il question que de style et de tristesse le matin de cette épreuve d'effort. D'abord, immédiatement, le style à l'état pur, le lapin écrasé au septième kilomètre, une Muerte súbita nonchalante qui toucha l'essieu avant pour passer à l'arrière et ressortir de sous la caisse, trajectoire de billard qui flirtait déjà avec la mort légendaire de Usagi Yojimbo, le lapin samouraï de Stan Sakai. Mais ce n'était encore qu'une citation, un hommage involontaire à un épisode légendaire du Coup du lapin. Mon vrai geste le matin de cette épreuve d'effort - geste soudain comme un débordement de bile noire dans le matin solitaire- ne surviendra que plus tard et fera oublier le reste, la fin de l'épreuve et ses maux de tête, les piqûres au thallium et le médecin, geste décisif, brutal, prosaïque et romanesque : un instant d'ambiguïté parfait sous le ciel du silo à grain, quelques secondes d'ambivalence vertigineuses, ou beauté et noirceur, violence et passion, entrent en contact- et provoquent le court-circuit d'un geste inédit.
Mais non, ce n'est pas vrai, je n'ai pas écrasé de lapin en allant à Chartres. Je roulais trop doucement de toute façon, concentré sur le lento du quatuor " américain " en fa majeur op.96 d'Anton Dvorak, découvert chez Christian il y a quelques jours à Montpellier.
Je savais que la journée allait être longue et je prenais le temps de penser.
Penser à tout ce que j'avais en retard dans mon travail (copies à corriger), dans mon journal (finir l'histoire de l'abbé de Rancé, j'y tiens, parler d'Emmanuel Tugny (Ronan P.)(qui a maintenant une vraie tête d'écrivain à la mode mais qui ne l'est pas encore) pour saluer son départ au Brésil, mettre à jour le site de mon ami de la Réunion Patrice Cujo avec un dernier tableau splendide à ajouter (extrait), ...)
C'était l'opulence du matin, quand la journée qui commence semble encore pleine de possibles...
Penser à ce que l'on fera après, quand on aura fait tout cela, aux livres à lire, aux amis à visiter, aux voyages qu'on aimerait encore faire, au livre qu'on aimerait écrire...
J'aime le brouillard.
C'est simple de dire à quoi l'on pense, ou dire ce que l'on aime.
Plus difficile de dire ce que l'on pense ou ce que l'on n'aime pas.
Bon, je promets que je ne parlerai plus de la Mélancolie de Zidane.
Je continue de penser que la salle de bain, c'était bien.