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Vendredi 19 octobre 2007 | jour précédent | jour suivant | retour au menu |
Du cimetière de Thiron-Gardais à Lautréamont, ou : du livre à l'épitaphe. Ça fait 35 ans que je dis à ma mère que si je meure à l'étranger, qu'elle ne s'endette pas à mort pour ramener ma dépouille je ne sais où, et que je veux être enterré où je meure. Aujourd'hui, ce serait donc dans le cimetière de Thiron-Gardais. Il y a deux bonnes raisons supplémentaires : 1- Il est super bien situé, surplombant le parc de l'abbaye, accolé à la grange aux dîmes, notre Centre Culturel à nous. 2- Il y a plein de places de libre. Visiblement les gens d'ici ne renouvellent pas les concessions. Peut-être qu'ils n'ont plus de descendants vivants non plus. ...
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L'observation des plaques funéraires n'y est pas sans intérêt.Il y a bien sûr les plaques qui rappellent ceux qui ont fait une guerre ou une autre, ceux qui ont la légion d'honneur, les mentions qui signalent ceux qui ont été curé, maire...Mais ce ne sont pas les plus nombreuses. |
Dans cette région, de tradition agricole, on a bien
sûr beaucoup de cultivateurs...On retrouve sur les plaques
les lieux et les paysages,
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les compagnons d'une vie, le cheval d'abord, la tracteur ensuite...La plaque résume une dure vie de labeur.
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Mais heureusement, on se souvient aussi du mort, ce qui a égayé et soulagé sa vie, ce qui lui a fait passer le temps,
ce qui lui a fait accepter le dur travail, la récompense,
et que rappellent les plaques offertes par les amis.Avec avant tout la chasse et la pêche, les longues marches avec le chien, fidèle compagnon, dont on se rappellera aussi le nom.
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Pour d'autres, morts plus jeunes souvent, on devine les plaisirs, les passe-temps favoris,
les occupations, les associations ou clubs...
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Mais si on fait attention, ce qui est étonnant,
c'est la présence en large majorité, de livres.En granit, en marbre, et sur lesquels on peut lire des phrases définitives, des poèsies, des pensées éternelles, avec une décoration, quand il y en a une, faite essentiellement avec des oiseaux et des fleurs. Je pensais que si on rassemblait tous ces livres de pierre, on aurait une bibliothèque de poids ! Des tonnes et des tonnes.
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Il est quand même intéressant de remarquer que même des gens qui ne lisaient sans doute pas beaucoup, choisissent,
pour faire
passer un message pour l'éternité, comme symbole un livre ouvert !Le livre comme rempart contre l'oubli, comme chose qui reste et traverse le temps (dans la tête des gens), il y aurait beaucoup de choses à dire là-dessus. Le livre n'est pas mort et a encore, à mon avis, une longue vie devant lui. Sinon, les dernières bibliothèques seraient peut-être les cimetières, qu'elles sont déjà aux yeux de certains ! Je pense aussi à Senghor qui disait qu'un vieillard qui mourrait c'était une bibliothèque qui disparaissait ! Une recherche plus poussée sur Internet, montre que les marbriers se sont modernisés aussi et sont passés à l'ère numérique sans problèmes, eux ! Ils proposent des logiciels en ligne qui vous permettent de faire en direct vos plaques, en ce que vous voulez, avec la police que vous voulez, la photo choisie, les phrases que vous voulez etc. On peut imprimer la simulation et demander ensuite le devis. C'est cher, et ça rapporte gros. La concurrence fait rage entre les différents sites. Pour ceux qui n'ont pas d'idée, existe un grand choix de phrases toutes faites Elles sont bien sûr aussi lourdes que la pierre sur laquelle elles seront gravées. dans le best of... on trouve : - Comme une fleur fanée au souffle de l'orage, la mort l'a ravie au printemps de son âge. - Ton souvenir est comme un livre bien aimé qu'on lit sans cesse et qui jamais n'est refermé. - Le soleil brillait, les jardins fleurissaient, les oiseaux chantaient, et puis...ce fut le silence. Fallait pas s'attendre non plus à Lautréamont ! Pourtant ! Quel incontournable sur le marbre ! Il me parle bien aujourd'hui encore : "« Sur la terre humide que le fossoyeur remue avec sa pelle sagace, on combine des phrases multicolores sur l’immortalité de l’âme, sur le néant de la vie, sur la volonté inexplicable de la Providence, et le marbre se referme, à jamais, sur cette existence, laborieusement remplie, qui n’est plus qu’un cadavre. » (Les Chants de Maldoror - Chant II) « Quand elle me parlait des tombes du cimetière, en me disant qu’on respirait dans cette atmosphère les agréables parfums des cyprès et des immortelles, je me gardai de la contredire ; mais, je lui disais que c’était la ville des oiseaux, que, là, ils chantaient depuis l’aurore jusqu’au crépuscule du soir, et que les tombes étaient leurs nids, où ils couchaient la nuit avec leur famille, en soulevant le marbre. » (Les Chants de Maldoror - Chant III) (au passage remarquons que chez les marbriers n'est pas ornithologue qui veut, car c'est n'est pas une fauvette qui est représentée mais un chardonneret !) |
(voir les contextes de marbre chez Lautréamont,
sur le site de référence Hubert de Phalèse de Paris3) J'avoue qu'en sortant je n'avais pas fait mon choix. J'hésite encore entre les deux. ..
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