Vent glacé, plage et ville vides. Moules frites.
Du haut de la Tour Vauban, je découvre cette plage insensée recouverte de coquilles Saint-Jacques, les traces du tournage de certaines scènes du
C'est d'ici aussi que Guillaume le Conquérant préparait ses bateaux pour envahir l'Angleterre.
Il fait toujours aussi froid et je gagne dans un café, en grattant un de ces jeux débiles qui m'énervent, la somme de
30 euros...
Mais le reste infernal, touristisé, commercialisé, poulardisé, pollué, carcassonnisé, arnaqueur et de mauvais goût...
Normal, puisqu'en moyenne 3.000 pigeons y passent par jour chaque année !
Il me semble là subitement que le sens de la vie est simple : être là et vivant.
9 mai 2010, Saint-Amand-Montrond, 12h12.
Après avoir acheté viennoiseries et autres spécialités locales très appétissantes, Fred m'emmène voir leur célèbre folie qui s'appelle la cité de l'or,
espace qui peut servir à tout mais qui ne dessert par grand chose.
Frédéric et moi sommes fatigués mais très en forme.
Après un repas arrosé de Saint-Julien, je rentre à Thiron-Gardais, calme et diverti. Les 400 km ne me paraîtront pas longs.
10 mai 2010.
Aussi incroyable que cela puisse apparaître, Frédéric m'appelle vers 11 heures, m'annonce que ses deux ménisques sont coincés, qu'il ne peut plus bouger,
que le seul spécialiste qui s'occupe de ça est à Caen, et m'explique que ce serait bien que je vienne le chercher puisqu'il a obtenu un R.V. exceptionnel demain matin !
Je reprends donc 30 minutes plus tard la route : direction sud vers Saint-Amand-Montrond (d'où je viens donc de rentrer la veille au soir), puis remontée vers le Nord : Tours, Le Mans, Caen !
710 km dans cette journée intéressante à cause du temps disponible qui nous a permis de longues discussions faites en tête à tête, avec la satisfaction en plus d'avoir
été utile et d'avoir rendu service à un ami que j'estime profondément depuis maintenant 20 ans.
L'occasion aussi de revoir Sandrine le soir à Ouistreham.
11 mai, Saint-Aubin-sur-Mer, 20 heures.
Il y fait toujours aussi froid et le vent y est aussi fort que les moules y sont bonnes.
Du 12 mai 9h30 au 15 mai 18h30 : hôpital de Chartres, service cardiologie.
Bah c'est comme ça. Le malaise arrive en prévenant cinq minutes avant, incroyable mais vrai, alors que j'étais chez le cardiologue pour venir chercher les résultats d'examens précédents !
Je tombe dans les pommes, le coeur s'arrête, mouvements désordonnés, je me déchausse une dent, en casse une autre. Massage cardiaque. Réveil en sueur, ambulance,
et suite des services et examens, jusqu'à la coronographie...
Passons puisque tout passe,
même ce qui ressemble au déplacement de l'air d'une grande aile noire silencieuse...
Angoisses et leitmotivs, on regarde la trotteuse de l'horloge pendant des heures, incapable de penser, de se dire autre chose
que "ce n'était donc pas cette fois-là encore", ou que "le type que je vois là, à travers la fenêtre, marcher insouciant sur le parking de l'hôpital,
il ne sait pas la chance qu'il a".
Même si la dégradation du service public m'a semblé évidente, je reconnais certains progrès : on ressort aujourd'hui
avec le DVD
("mais attention, il ne fonctionne que sur un ordinateur, pas sur votre lecteur de salon !").
De quoi se rassurer le soir quand on rentre chez soi
et pouvoir se croire la nouvelle star !
J'avais emmené de la lecture mais fus incapable de lire une ligne durant ces quatre jours.
17 mai 2010, aire d'autoroute dite du grand Meaulnes, 18h18.
|
Nous allons voir la soeur de Sandrine qui
habite près de Clermont-Ferrand, au bord du gour de Tazenat, lac de cratère d'un volcan
datant d'environ 30000 ans,
où nous descendrons dès arrivés. |
|
18 mai 2010, balade dans les gorges de la Sioule, à Chouvigny et à Saint-Eloy-les-Mines.
Le dernier vestige minier est le chevalement du puits Saint Joseph, mais l'ambiance est toujours là, inscrite sur les maisons
de briques et autres traces.
Ouverte en 1789 cette mine a fermé en 1978 et il est fou d'imaginer
qu'il y a eu là jusqu'à 3000 mineurs (en 1947).
L'histoire de l'extraction du
charbon à Saint-Eloy est riche, et comme d'habitude semée de coups de grisous ou de catastrophes comme celle du 26 janvier 1950 que personne n'a
encore oubliée dans la région, et que rappelle la rue du même nom.
19 mai 2010, Paris XVIIIème, café le Patio, 18h50. Nous sommes venus, comme d'autres amis, pour faire plaisir et
encourager
Catherine
Leplat, et la féliciter de ses portraits assez impressionnants
et plein d'humanité des sans papiers qu'elle connaît.
Le quartier est animé, les rues peuplées et bruyantes, ce qui ne décourage pas les visiteurs d'envahir
le trottoir pour boire et fumer. Il fait beau et le moment est agréable. C'est un bon souvenir.
En revenant en voiture, dans la nuit, je ne sais pourquoi avoir pensé que peut-être ne peut-on aimer les gens que parce qu'on ne les connaît pas.
21 mai 2010, Rémalard, 13h45.
Déjeuner sur l'herbe sur la belle pelouse de mes amis Nadine et Alain.
Belle parenthèse et bon moment de repos pour moi qui commence à subir la
fatigue de ce mois de mai pour lequel je n'avais pourtant rien prévu !
22 mai 2010, La Chambrie, Thiron-Gardais, 14h30.
Repas d'anniversaire de Christiane, une de mes voisines, mais en profitons pour fêter, en plus du sien, celui de Sandrine
et le mien,
qui s'échelonnent du 21 au 23 mai.
Micheline,
que j'appelle parfois "la grand-mère", est de la partie.
Le temps est idéal, tout le monde est content de ses cadeaux. Belle convivialité.
Contrairement à certains amis que je connais, fêter ou ne pas fêter mon anniversaire ne me gêne en aucune manière.
Je m'en fous depuis toujours. Ce jour ne m'affecte ni ne me fait réfléchir plus qu'un autre. C'est le présent et le monde où je le vis qui
me touchent.
Ce jour-là n'a rien de particulier en lui-même. C'est un jour avec son propre poids d'originalité comme chacun des autres, et qui n'est aussi qu'un jour de
plus dans la suite commencée il y a 61 ans.
23 mai 2010, Angoulême, Festival Musiques Métisses, 15h32.
Fondé par mon ami Christian Mousset (au départ, c'était un festival de jazz), c'est toujours avec un peu de nostalgie que j'y retourne. C'est là que j'ai rencontré Rodolphe, c'est là que j'ai tenu en direct sur Internet
le premier journal du festival, c'est là que, c'est là que...
Au fil de l'après-midi je rencontre mes amis d'Angoulême : Pascale et Roberto, Jérôme et Sylvie, Frédéric et Sabrina... et
bien sûr Brigitte R. et Christian Mousset.
Belle séance de dédicace et rencontre très chaleureuse avec l'écrivaine libanaise
Hyam Yared.
Il est 00h45 du matin quand Salif Keita termine son concert. Crise oblige, il y avait un peu moins de monde
que d'habitude, et même s'il reste mon chanteur africain préféré, j'ai regretté que son
ensemble fasse ici un peu trop grosse machine qui tourne, bien et au quart de tour certes, mais un peu trop "fort" et manque un peu de douceur,
comme il sait le faire aussi.
24 mai 2010, Garat, 11h59.
Chez ma fille Élise nous fêtons sa mention AB à sa deuxième année de droit. Elle veut faire son master à Aix-en-Provence pour se spécialiser
dans le droit humanitaire. Je n'ai rien contre si ce n'est que nous ne savons pas trop comment aborder Aix où nous ne connaissons personne.
Et j'imagine que même un petit appartement là-bas ne doit pas être donné ! Mais en attendant, le beau temps et le soleil qui traverse la tonnelle
de vigne me font oublier les futurs problèmes. |
|
25 mai 2010, Verneuil-sur-Avre
Déménagement de ma mère pour sa nouvelle maison de retraite, et sans doute la dernière. Mon frère Jacky venu de Paris et moi faisons le mieux que nous pouvons pour essayer de la destresser
et diminuer ses angoisses, mais cela est difficile. Ambiance tendue.
Je reste une partie de l'après-midi avec elle dans la pièce où elle va passer maintenant la plupart de son temps.
Bon anniversaire Pierre Bergounioux !
27 mai 2010, Verneuil-sur-Avre, Thiron-Gardais.
Fin du déménagement de ma mère. Tout ce qui reste dans son ancien appartement et qu'elle n'a pas pu prendre dans sa nouvelle chambre, doit être transféré dans ma grange de Thiron.
Emballer et vider tout ce qui reste des affaires de quelqu'un en son absence
est assez éprouvant psychologiquement.
Cela fait comme si elle était déjà morte, partie, disparue.
Tous ces objets de la vie quotidienne
abandonnés, bien rangés,
et dont on connaît certains depuis des années, voire depuis son enfance,
se mettent à parler et
nous rappellent aussi combien on a vieilli et combien notre temps imparti passe vite... |
|
J'essaie de rester calme, ne rien dire et ne rien montrer. Tout se passe bien. Etat des lieux, remise des clefs et
retour à Thiron.
Ma grange est une fois de plus remplie. Décidemment je ne m'en sortirai jamais, moi qui la rêve depuis si longtemps vide et propre comme un temple zen. |
29 mai 2010, Place Saint-Pol, Nogent-le-Rotrou, 18h12.
Rochet-Schneider, Delage, Amédée Bollée, De Dion-Bouton...
Exposition pour fans et connaisseurs. Elles roulent encore toutes.
29 mai 2010, Hôtel de ville de Rémalard, 22h10.
Excellente soirée dans l'ancienne maison du grand-père d' Octave Mirbeau. Max Coiffait, spécialiste que j'apprécie
particulièrement (voir aussi ici à propos de 628-E8) et qui a passé une bonne partie
de sa vie à le faire apprécier, lisait un choix de textes donnant une bonne idée à la fois d'un parcours et des différents aspects de
la personnalité hors norme d'Octave Mirbeau... Exceptionnel Max Coiffait qui debout a tenu son auditoire en haleine jusqu'à 23h30, et a donné , une fois de plus, l'envie de lire et
relire Octave Mirbeau, qui un siècle après sa mort, n'a pas encore la reconnaissance littéraire qu'il mérite.
|
|
Faut dire qu'être anticlérical, antimilitariste, antipoliticien, défendre l'union libre, conseiller de ne pas aller voter...
ne passe pas bien encore
aujourd'hui et reste d'actualité.
31 mai 2010, Chassant, 13h25.
Sur la terrasse ensoleillée il n'y a que les voitures à regarder passer, et avoir une pensée pour le poète qui dans la préface de Plupart du Temps écrit :
"De ma vie je n'aurai jamais rien su faire de particulièrement remarquable pour la gagner, ni pour la perdre.
Voici un témoignage partiel du genre d'activité qui a absorbé la plupart de mon temps.
Qu'il n'y ait pas lieu d'en être exagérément fier, on n'aura pas besoin de me le dire.
|
|
Nul doute qu'il y ait eu infiniment mieux à faire.
Mais quoi, l'occasion se dérobe à chaque tournant. Elle s'évanouit comme une ombre.
Pourtant, je suis toujours plutôt un peu en avance aux rendez-vous, parce que l'inexactitude est la politesse du peuple.
Toujours debout aux premières lueurs de l'espoir, je ne cède au sommeil qu'à la plus extrême limite du désastre."
(Extrait de la préface de Plupart du temps, Pierre Reverdy.)
Il est 15h42.
Je viens de m'apercevoir que le vent a couché les pivoines sur la pelouse.
Mais je dois me dépêcher, car je n'ai rien préparé et demain je pars au Liban.