mercredi 10 août 2005 Hier Avant hier
Je pourrais faire un blog...
Je pourrais faire un blog que sur les chiens, tous les chiens qui se baladent dans les peintures, dans la peinture...Je parie qu' ils y laissent moins de crottes que sur nos trottoirs... Je pourrais faire un blog que sur les oiseaux, tous les oiseaux qui se reposent ou volent dans les peintures... Je parie qu'ils y laissent moins de plumes que dans nos campagnes chasseresses... Je pourrais faire un blog que sur Saint-Simon, m'intéresser à des petits problèmes qui n'intéressent pas trop les spécialistes : fumait-il ? Quel tabac ? Comment s'habillait-il ? Avait-il des chiens ? Quel nom leur avait-il donné ? Je pourrais faire un blog que sur les blogs, faire la revue quotidienne de ce que j'ai lu sur une dizaine de blogs...ou choisir " chaque jour un blog "... Je pourrais faire un blog que sur n'importe quoi, vaste sujet s'il en est un : c'est quoi n'importe quoi ? Pourquoi et le n'importe quoi est-il si déroutant et difficile à vivre... Je pourrais faire un blog avec et sur le hasard, au hasard du blog, le blog du hasard, une page quotidienne par hasard, faite à partir d'un coup de dès, d'un mot pris au hasard dans le dictionnaire, de n'importe quoi fait au hasard... Il y a bien le beau désordre de P. de Jonchkeere, pourquoi pas le hasard de jcb, le bazar de jcb, le foutoir de jcb, le n'importe quoi de jcb...le tout au hasard...?
Blog à part, C'est déjà un peu tout ça pour tout le monde...non ? On se débat, on s'énerve, on s'oblige à, on essaie de, on s'efforce de, par plaisir, par mal-être, par jeu, on s'amuse, on travaille, on accroche chaque jour ce qu'on peut, ce qu'on veut, on expérimente, on essaie, on traîne, on batifole, on prend des notes, on garde des traces, des liens, on fait semblant, on ment, on triche, on rêve, on prétend que, on fait le beau, " son intéressant " comme disait ma grand-mère, on ballade son ego, ses névroses, ses complexes, ses doutes, on va voir chez les autres si j'y suis, on s'assure on se rassure, on se tracasse, on sème un peu comme on peut pour s'aimer comme on peut... pour essayer de supporter ces invivables questionnements, envies, contradictions, illusions, images, peur et mots qui sont comme la mie et la croûte du pain quotidien et qu'il est difficile d'avoir l'une sans l'autre...
Et finalement, " finalement, finalement, il nous fallut bien du talent...", pour essayer malgré tout, chercher, ne pas capituler, si... capituler, parfois, arrêter, repartir, réessayer, tenter, oser, ne pas tenir compte, continuer sans réponses, malgré les réponses, les réponses qui n'en sont pas...
Je continue de penser que mettre en ligne son journal ou faire son blog n'a rien à voir avec l'écriture ou la littérature, celles qu'on peut écrire avec un grand e ou un grand l, même si ces dernières peuvent en être le sujet ou la préoccupation, la tentative, le rêve, l'inaccessible point d'achoppement, le point d'échauffement où la navette explose, ce qui sauve ou ce qui tue, l'étoile de tous ceux qui sont perdus dans le désert, de tous ceux qui brûlent où ça fait mal... il n'y a que l'inaccessible qui soit tentant bien sûr... qui fasse tenir debout.
J'ai une manière de lire les blogs qui parfois me les fait entrevoir comme délires et persécutions, Concile de Trente ou révocation de l'Edit de Nantes, Nuits du chasseur ou Jardins des délices, rêves lucides ou de celluloïd, décors de carton pâte ou béton armé. Et c'est bien sûr pour cela que je les aime...comme autant de fautes de frappe.
" Sur l'écran noir de mes nuits blanches..." chantait-il, " Sur l'écran blanc de mes nuits noires..." pourrais-je lui répondre, puisque mon fond d'écran (comme on dit le fond de l'air) est blanc... Certes avec une femme comme je les aime...Forcément belle et tragique, dit-il.
"La question n'est pas tellement de savoir si l'homme est malade ou bien portant ; elle est de savoir ce qu'il fait de sa maladie ou de sa santé" Ludwig Hohl