L'infâme affaire de Nonancourt,
d'après un extrait des Mémoires de Saint-Simon (Tome 13, chapitre XIII), touche no6.
(touche précédente ou
voir dossier Saint-Simon)
Suite du texte de Saint-Simon : (nous sommes en novembre 1715)
"Stairs avait proposé un traité de garantie des successions des royaumes de France et d'Angleterre,
et avait reçu pouvoir de le signer. Le régent y voulut ajouter une alliance défensive
entre ces deux couronnes et la Hollande, qu'il jugeait nécessaire pour servir de base
à la garantie réciproque. Buys, ambassadeur de Hollande, y entra; mais Stairs, qui
voulait brusquer la garantie, s'éloignait de l'alliance défensive, dont il craignait
la longueur de la traiter. Il craignit aussi que le régent ne cherchât à gagner du
temps pour voir ce que deviendraient les affaires d'Angleterre, et il s'échappa à
dire à Son Altesse Royale que, s'il
regardait ces troubles avec indifférence, l'Angleterre aurait la même
pour ceux qu'elle pourrait voir naître en France. |
Stairs, qui représente le roi George d'Angleterre, essaie de convaincre le régent,
le duc d'Orléans, d'empêcher le Prétendant, réfugié en France, de se rendre en Angleterre pour
reprendre le pouvoir en Angleterre, où ses partisans, les Jacobites l'attendent. |
Ils en étaient en
ces termes, lorsque le Prétendant disparut de Bar, et que Stairs
vint crier à M. le duc d'Orléans sur son passage par la France,
et lui demanda de le faire arrêter. |
Le Prétendant: Jacques François Édouard Stuart, fils de Jacques II.
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Le régent, qui avec adresse nageait
entre deux eaux, avait promis au Prétendant
de fermer les yeux et de favoriser son passage,
pourvu que ce fût sous le dernier secret; et en
même temps accorda à Stairs sa demande. |
Philippe, duc d'Orleans, Régent de France pour Louis XV. Neveu de Louis XIV. |
Il fit
partir sur-le-champ Conta qui lui était affidé,
et fort intelligent, et major du régiment des gardes,
dont j'ai parlé plus d'une fois, avec son frère lieutenant
dans le même régiment, et deux sergents à leur choix, pour
aller a Château-Thierry attendre le Prétendant, où Stairs
avait des avis sûrs qu'il devait passer. Contade partit la
nuit du 9 novembre, bien résolu et instruit à manquer celui
qu'il cherchait. Stairs, qui ne s'y fiait que de bonne sorte,
prit d'autres mesures qui furent au moment de réussir; et voici ce qui arriva:..." |
Contade est un homme de confiance, qui a déjà rempli plusieurs missions...Lire
le portrait que Saint-Simon en fait dans le tome précédent.
On comprend dès maintenant que le régent joue un double jeu : d'un côté il promet à l'anglais d'arrêter le Prétendant,
de l'autre il demande à Contade de tout faire pour ne pas le faire. |
Routes d'aujourd'hui, carte Michelin.
Ces routes bien sûr ne sont pas celles qui existaient à l'époque. Pour les connaître,
rien de mieux que regarder la célèbre carte Cassini.
Dressée par ordre du roi Louis XV,
la "Carte de Cassini" est la plus ancienne des cartes
de la France entière à l'échelle topographique. son histoire est exceptionnelle.
C'est à l'initiative de Louis XV,
impressionné par le travail cartographique réalisé en Flandre,
qu'est levée la première carte géométrique du Royaume de France.
César François Cassini de Thury dit Cassini III,
fils de Jacques, est chargé de réaliser ce travail
à l'échelle "d'une ligne pour cent toises", soit 1/86400e.(1cm= 864m)
La carte s'appuie sur le réseau géodésique que viennent d'établir
(de 1683 à 1744) Jean-Dominique Cassini et son fils Jacques
(père de Cassini de Thury).
Les levées commencent en 1760 avec César François Cassini de Thury.
Jacques Dominique Cassini fils de César
François Cassini de Thury finit les levées.
Il aura fallu 30 ans pour effectuer ce travail gigantesque.
C'est donc une histoire de famille, puisque quatre générations de Cassini
se seront consacrées à la réalisation de la carte (publiée pour cause de révolution qu'en 1815) qui mérite de porter aujourd'hui
le nom de cette famille pour laquelle on peut se passionner facilement. De
nombreux sites racontent
son histoire..
Pour tout savoir des cartes, comment les acheter, ou les consulter sur Internet, une page est
incontournable ainsi que celle de Sylvain Chardon,
Locom France. Le site de Gencom est
aussi exceptionnel : on tape le nom d'une commune et on a aussitôt tout ce qu'on veut, y compris la carte Cassoni du coin !
Attention : on devient vite accro, et c'est difficile de ne pas partir en carrosse traverser la France de l'époque.
Rien que les légendes de la carte font rêver.
Un site leur est consacré.
Il y même le nombre d'arches de chaque pont en pierre !
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Revenons à notre histoire. La carte de Cassini montre que le Prétendant
n'est pas passé par la route de la carte Michelin.
Il sort forcément de Bar le duc par la route qui va vers Nettancourt, indiquée sur la carte "GRANDE ROUTE DE PARIS".
De là il quitte l'ancien
chemin romain et va vers Châlons en Champagne en prenant ce qui aujourd'hui est
la petite départementale D1 qui passe par les petits patelins de Charmont et Possesse...
En effet sur la carte Cassini, cette route
à l'époque était plus importante et est indiquée (souligné en jaune)
comme étant la route normale pour aller de Châlons à Bar le Duc.
C'est en fait le plus court. De là, il prend la route indiqué "chemin de Paris à Châlons", qui passe par Epernay
et correspond aujourd'hui à la
D3. Superbe route qui suit la vallée de la Marne, empierrée et bordée d'arbres indique la légende !
Il arrive à Château-Thierry après avoir traverse Dormans et longé toute la vallée de la Marne.
la topographie indique bien le pourquoi de la route.
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C'est donc là qu'il doit se faire cueillir par Stairs et ses sbires (pour être assassiné sans doute)
ou par Contade et les siens dont son frère. Mais
on sait que Contade, comme l'écrit Saint-Simon, est " bien résolu et instruit à manquer celui qu'il cherchait ".
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Et alors, et alors ? Qui a pris le Prétendant le premier ? Stairs ou Contade ? Contade ou Stairs ?
Ni l'un ni l'autre bien sûr, car rien ne s'est passé comme prévu.
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Pour ceux qui apprécient son art : portrait de Contade par Saint-Simon, les Mémoires, Tome 12 - CHAPITRE VII.
" Contade était un gentilhomme d'Anjou, qui avait été beau et bien fait, qui avait été fort
à la mode en galanteries nombreuses et distinguées, qui s'en mêlait encore, qui par d'excellentes
chiennes couchantes que son père et lui donnaient au roi de temps en temps, s'en était fait connaître,
puis goûter dans le détail de son emploi qui l'approchait souvent de lui. Il était aimé et considéré
à la cour de ce qu'il y avait de meilleur et de plus distingué; il avait pris tout le soin possible
de l'être aussi du régiment des gardes, de toute l'infanterie dont il faisait le détail à l'armée,
et de ce qui y servait de plus marqué en naissance, entours ou grades, surtout en mérite pour les
officiers particuliers. Il avait peu d'esprit, mais tout tourné à la conduite, du sens, du secret,
du jugement, une modestie qui le tenait plus qu'à sa place, et dont on lui savait gré, beaucoup
de sagesse et une discrétion qui lui avait dévoué les dames, en sorte que, d'amant heureux il était
devenu ami de confiance. Il l'était de Mme de Maisons,
et Maisons qui le voyait un personnage en son genre, et qui ne négligeait rien, en avait fait le sien." |
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