samedi 23 juillet 2005 Hier Avant hier
J'ai du bon tabac...
(page dédiée à Georges Poisson).
Il est difficile de savoir exactement comment était le château de la Ferté-Vidame quand Claude de Saint-Simon (le père) l'a acheté.
La plupart des illustrations que l'on possède ont été faites au XVIII è siècle après les travaux effectués par Louis.
Ce qui est sûr c'est que c'était, au départ une enceinte fermée dans laquelle on entrait par deux pont-levis, l'un situé au Nord, l'autre au Sud. Ces ponts étaient dans deux grosses tours carrées coiffées en dôme et que l'on traversait par un passage voûté.
Toutes les illustrations que l'on possède montrent que les courtines ouest, Nord et Sud (murs qui reliaient les tours) ont été détruites sous Louis, ce serait d'ailleurs les seuls grands travaux dans le château qu'il fit. On n'en connaît pas la date, mais sans doute après 1719, quand Saint-Simon fils obtint du Régent le remboursement de la " dette de la fronde " contractée par son père 60 ans auparavant.
On comprend l'intérêt d'abattre ces courtines : Cela donnait de la lumière sur la cour mais aussi des vues sur le parc. Cela laissait deux tours un peu seulettes au bord du terre-plein, mais bon...question de choix.
Ce n'était pas sans inconvénient non plus puisque visiblement la tour carrée sud s'est lézardée et a obligé la construction d'un contrefort.
Une erreur certaine sur le lavis de la bnf : il manque une tour, la deuxième en partant de la gauche.
Avant d'en venir au plat consistant, citons quelques documents qu'on peut trouver en hors-d'oeuvres et dans certains ouvrages :
Dans l'ouvrage passionnant de Baschet, incontournable pour l'inventaire fait après la mort de louis, on trouve une gravure (montrant une vue sud)due " à l'habile et heureux burin "de M.J.Mollard :
On juste remarquer que les reflets de la façade Nord sont impossibles dans l'eau du fossé sud...fossés d'ailleurs qui semblent dans un bien triste état...et non entretenus.
Dans le même ouvrage, on apprend dans l'inventaire de l'Hôtel de la rue de Grenelle, où est mort le duc, dans la pièce visiblement la plus intime, que dans un tiroir de son bureau, parmi d'autres objets précieux, on a trouvé une tabatière à gondolle d'argent.
Cela me fait plaisir allez savoir pourquoi. Sans doute parce que je peux l'imaginer la nuit, entre deux chapitres, s'offrir une petite prise, comme moi je fume une cigarette entre deux paquets de copies, ou deux paragraphes de ce journal.
Mais on a trouvé aussi dans la chambre où il est mort, accrochés sur les murs trois estampes représentant la perspective de la Ferté-Vidame.
La note en bas de page (p. 74) est intéressante :
Avis aux amateurs, le livre de Baschet date de 1874 certes, mais où sont passées ces trois estampes ?
Sacrée trouvaille à faire en salles des ventes non ?
On connaît aussi les deux perspectives, faites par Drouyn vers 1745 (ou 43 selon les ouvrages) (et donc du vivant de Saint-Simon) et appartenant à la famille Vieiljeux (racheteur du domaine dans les années 35)
Les documents les plus célèbres sont les gouaches de L.N. Van Blarenberghe (1716, 1794).
Deux d'entre elles (celles que l'on peut trouver en couleur) sont visibles au Musée de Boston, USA, et quatre autres sont perdues mais connues grâce à des photographies (on les connaît donc en noir et blanc).
Quatre gouaches montrent le château vu des quatre points cardinaux.
Bien qu'étant réalisées du vivant de Saint-Simon, on ne sait pas s'il les a vues ni quand Blarenberghe est venu à la Ferté. Il semble impossible, le duc étant quasiment ruiné à la fin de sa vie, qu'il puisse s'agir d'une de ses commandes.
La famille lilloise des van Blarenberghe (cinq peintres reconnus sur un siècle) est surtout célèbre par Louis-Nicolas pour ses miniatures et autres couvercles de boites, tabatières et pour ses nombreuses commandes de batailles ou de vues de villes...
Les gouaches de la Ferté datent de son arrivée à Paris à l'époque où il est en train de se faire un grand nom, c'est-à-dire un super carnet d'adresses de pipoles.
Ses amis et commanditaires et protecteurs furent après les grands familles lilloises et celles de la cour du roi : Choiseul, Richelieu, Ségur, le cardinal de Rohan, la Marquise de Pompadour... Sa renommée fut telle qu'il travailla aussi pour le Tsar Pierre III de Russie pour lequel il réalisa en 1761 une tabatière montrant L'évolution du Régiment de Holstein, avant de recevoir une commande Catherine II de Russie...
(très belle biographie faite par le commisseur priseur Philippe Rouillac, qui a vendu en juin 2003 une paire de gouaches de L.N. van Blarenberghe, le siège de Yorktown et la prise de Yorktown, commandés par Louis XVI pour offrir au Comte de Rochambeau, pour plus d'un million d'euros, record pour une vente faite en province, salué dans toutes les revues spécialisées.
Un million d'euros, d'accord, mais ça ne fait peut-être pas si cher que ça pour chaque petit soldat ! (vraiment petits les soldats, car les trois quarts du tableau sont en fait occupés par le ciel, et la gouache ne mesure que 59,5 cm x 94,5 cm )
Les frères Blarenberghe ! et leurs tabatières !
On est bien sûr retombé dans la miniature, la peinture avec en prime l'orfèvrerie.
Tabatières de Henri-Joseph van Blarenberghe :
et celles de Louis-Nicolas van Blarenberghe :
Manque la plus belle : celle où est représenté le château de Saint-Simon bien sûr !
Issue d'une collection privée, elle fut acquise pour le Louvre en 1999.
Une pure merveille !