mardi 27 février 2007 jour précédent jour suivant retour au menu
Le temps immobile
ou juste le temps d'une histoire de temps...

La première chose qu'ont vu les filles en arrivant chez leur grand-mère, c'est que le calendrier n'était pas à jour. Le temps de réaliser que c'était bien la première fois qu'en effet ma mère n'arrachait plus les pages, ce qui montre une étape de plus dans sa vie, elles se battaient pour arracher les pages pour " lire les histoires drôles ", et qu'il a fallu que j'installe une fois de plus, cela arrive souvent en ce moment, un " chacun son tour ".
C'est vrai que c'est agréable, voire jouissif, quand on est jeune, d'arracher les jours. On trouve qu'ils ne passent pas assez vite. Les jours de fêtes, d'anniversaires, de vacances, ne viennent jamais assez vite. Le succès du calendrier de l'avent chez les enfants en est une des preuves.
Jeune on a l'impression que le temps est immobile.
On vit, le temps passe...et puis à partir d'un certain moment, la vieillesse et le bilan se faisant, on a de nouveau l'impression que le temps est immobile, qu'il est redevenu immobile.
Aux deux frontières de la vie tout se passerait donc comme si l'on retrouvait notre vraie mesure, celle d'une étincelle de néant, du craquement de l'allumette qui allume une cigarette dans la nuit de notre galaxie vouée à être aspirée dans un trou noir. La tentation est forte de laisser au pire son mégot, au mieux accepter d'en avoir été la fumée.
J'ai déjà dit ici une fois il me semble, je ne sais plus quand, combien Le temps immobile de Claude Mauriac me semble une oeuvre aussi unique et originale, monstrueuse à mon avis, et qui m'a marqué et influencé autant, que la Recherche de Proust.
On peut rappeler que Claude Mauriac, à qui son père, qui avait rencontré Proust lors d'une fête en l'honneur de Jammes le 3 février 1918 chez Mme Daudet, avait fait lire Proust, Dovstoievski et Joyce à la sortie de l'adolescence, a intitulé Le volume X du Temps immobile, le dernier, paru en 1988, L'Oncle Marcel...ce qui n'est pas un hasard...et qu'il est aussi l'auteur du Proust par lui-même (no 11 paru au seuil en 1953) et que j'avais acheté et lu, en 1968, avant de lire la Recherche, mais ceci est une autre histoire...
Hostile à tous les procédés classiques de la narration romanesque, son monumental journal travaillé, véritable traitement de texte par thèmes, dé-montage et montage extraordinaires faits à coups de ciseaux et d'allers et retours dans plus de soixante ans de journal tenu au jour le jour, de rencontres et d'Histoire, est un chef d'oeuvre (dont l'écriture et la (dé)construction ont demandé 20 ans), qui re-monte le temps pour nous y re-mettre et nous en soustraire. Tentative (réussie pour moi lecteur à cause du work in progress permanent qui y est inclus, expérience du labyrinthe et de " l'indicible par la composition ") comme celle de la Recherche, de rejoindre l'éternité, " d'assurer une victoire de l'esprit sur la mort ".
Bienheureux ceux qui n'ont pas encore lu ces dix volumes. Choisissez une île déserte, l'expérience et l'aventure dont on ne revient pas indemne sont assurées, celles du temps écroulé.
Je pourrais dire simplement : préparez-vous au coup de foudre.
Pour des gens comme moi qui ont, oserais-je dire avec compulsion et désespoir, tout gardé des traces de leur passage, depuis l'âge de 15-16 ans me concernant, comme preuve (avec espoir) qu'il s'était bien passé " quelque chose ", c'est bien sûr dans cette œuvre, découverte grâce à Christian D. au Sénégal, que je puise le projet qui m'anime depuis longtemps, de travailler sur ces traces et qui m'a fait ouvrir mon premier site sur Internet en décembre 2001.
Comme non pas un exemple à suivre mais une méthode, mais aussi avec l'idée de laisser à mes filles, qui sont jeunes et ne me voient pas souvent, des documents qu'elles pourront consulter plus tard, au cas où elles seraient intéressées un jour de savoir, découvrir (ou inventer) qui était leur père.
Car histoire de ne pas être tout à fait chocolat, il me semble parfois sentir le filtre...
Sale temps pour les vacances.
Venteuses et pluvieuses... ces dernières journées de février, mais je les aime.
Il y a des coups de foudre dont on ne se remet pas et qui ne refroidissent pas..
Demain j'emmène les filles à la piscine de Nogent le Rotrou (superbe complexe Aquaval). Du toboggan en perspective ce qui n'est plus tout à fait ni dans mes habitudes ni dans mes aptitudes, mais je pourrai me consoler plus tard en fumant et en mangeant du chocolat, immobile.
Thym, chocolat noir, thym frais. Irlande, chocolat noir, café arabica, crème de Whisky. Giroble & citron, chocolat noir, clous de girofle de Malaisie, zestes de citron frais. Poivre, chocolat noir, mélange de poivres de Chine. Framboise, chocolat noir, pulpe de framboise fraîche. Fleur de sureau, chocolat au lait, infusion de de fleurs de sureau. Romarin, chocolat noir, romarin frais. Basilic & citron, chocolat blanc, bailic frais, zestes de citron frais. Viet-nam, chocolat noir, gingembre et c²itronnelle frais. Cuba, chocolat noir Cuba, éclats de fèves de Cacao.