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De Thiron-Gardais en France aux photographes du Perche
exposition Des voix, des visages,,
ou : Le Perche qui touche et que l'on aime.

Une exposition de portraits n'est pas en soi originale et le concept existe depuis longtemps. Mais le remarquable ici, outre que les portraits faits par les trois photographes (Frédéric Chehu, David Commenchal et Philippe Schlienger) sont d'excellente qualité, tient dans leur présentation réussie dans un lieu ingrat et vide : une église.
Car pour ceux qui la connaissent, l'église de l'ancien prieuré de l'écomusée de Sainte-Gauburge est non seulement grande et haute, mais l'acoustique y est détestable. C'est donc tout le mérite des deux commissaires de cette exposition (Nathalie Fey et Frédéric Chehu) d'avoir trouvé une scénographie originale, capable de faire apprécier plus de 250 portraits de gens du Perche, des plus jeunes aux plus âgés, et d'avoir empli cet espace de chaleur et d'humanité et avoir su l'habiter.

Une autre bonne idée est d'avoir tiré les portraits un peu plus grands que taille réelle, ce qui fait bien sûr que face à eux on subit une perturbation inconsciente mais très efficace.
Chacun nous regarde droit dans les yeux, on ne peut fuir leur regard : il nous vise et nous atteint, et il faut le dire, nous conquiert.

Le parcours proposé sur les deux niveaux séparés par des marches est original et permet du recul. On s'aperçoit du travail fait mais surtout bien pensé en amont.
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Les images et les modèles se rencontrent et se découvrent, on reconnaît son voisin son charcutier ou le paysan du coin. Nombreuses mises en abyme, sourires sur les bâches, sourires des visiteurs. Une sorte de bien-être, d'être là et se sentir avec eux percherons, d'origine ou tardifs arrivés. On dit ici : accourus.
On peut s'amuser aussi à chercher qui est qui, qui fait quoi, ceux que l'on connaît, ceux que l'on ne connaît pas, s'approcher ou reculer, toucher la bâche magique, faire des photos des photos, les recadrer ou n'en prendre qu'une partie, se faire prendre devant.
La plupart sourient, d'autres montrent leur ventre promesse ou leur objet fétiche, en habit ou en Superman qu'importe : ils semblent bien dans leur peau et disons-le heureux, chacun tel qu'il se montre et qu'il est. Un grand mérite de cette exposition est qu'elle est contagieuse.
Tout le monde ne le sait pas mais elle est aussi le résultat d'une histoire qui s'est faite en plusieurs étapes et qui aboutit ici pour célébrer à juste titre les 40 ans de l'écomusée. À la fois aboutissement, constat de la transformation sociologique d'une région cette exposition est aussi une promesse d'avenir.
Comme son titre l'indique, cette exposition permet aussi d'écouter un montage sonore construit par Philippe Courtin à partir d'une centaine d'interviews réalisées en novembre dernier. Si on prend le temps de l'écouter avec attention elle réserve de petites et belles surprises et ne manque pas de faire sentir et réfléchir sur l'avenir du Perche dans ce monde moderne (avenir de l'agriculture, mutations irréversibles...), sans empêcher à d'autres moments de partager une certaine nostalgie du passé ou de l'enfance.
On peut s'assoir aussi pour regarder une sorte de making off réalisé par Papillon Production (Isabelle Battesti et Sarah Denis), trace du travail fait en amont de cette exposition, et occasion d'en montrer certains acteurs.
Ayant visiblement étonné et touché tous ceux qui sont venus au vernissage, cette exposition mérite le déplacement et qu'on en parle. C'est à la fois une occasion de remettre en cause certains clichés que l'on a tous sur le Perche, et aussi d'y faire aux sens propre et figuré de belles rencontres.
Emmenez-y vos amis, vous ne vous ennuierez pas.
Elle est ouverte tous les jours, de 10h30 à 18h, jusqu'au 7 mai.