page précédente (Laurent Bahanag) Lundi 27 février 2012 page suivante (voix et visages) retour au menu
20 jours en février
Tout va bien, mais dans un monde qui bascule.

Je ne peux pas dire qu'il ne se passe rien dans ma vie ni dans le monde, mais tout passe et il n'en reste rien, qu'un drôle de goût fade.
Que mes amis se rassurent. Je ne déprime pas, je suis sans doute fatigué et ai du mal à me distraire, c'est tout.


Il a fait vraiment froid ici, certaines nuits descendant en dessous de -10°, il y a eu beaucoup de neige et elle est restée longtemps. C'était beau et heureusement le chasse-neige est passé cette année jusque dans ma cour dès le premier matin. J'ai eu beaucoup d'oiseaux à regarder à travers la fenêtre.
Ils marchaient aussi sur la glace de l'étang de Sainte-Anne.
Les plus rusés : les canards, se blottissant par vingtaine et arrivant à faire fondre la glace et se faire une petite mare.


Temps idéal bien sûr pour rester enfermé pour lire le tome 3 des carnets de Pierre Bergounioux, toujours identique à lui-même, continuant imperturbablement son travail, et qui suscitera toujours les mêmes commentaires. Je continue de penser que ses carnets de notes sont à part du reste de son oeuvre, tout en en constituant la colonne vertébrale.
"Si ces pages ne sont ni extraordinaires ni exaltées, c'est que Bergounioux entend nous parler - sans pour autant se hisser au-dessus de nous. Son journal fait partie de ces livres qu'il faudrait toujours rendre accessibles dans sa bibliothèque. Car il aide à entendre que c'est au coeur de la normalité de nos vies que se joue un mystère quotidiennement renouvelé : "Nous nous ressemblons tous. Les mêmes choses nous touchent de la même façon. Je postule une forme de conformisme à la fois intellectuelle, logique et morale. Ce qui me révolte, révolte mes semblables. Ce qui m'exalte leur met les larmes aux yeux."
(Monde des livres) Lu aussi sa longue interwiev dans Télérama et la critique de Tiphaine Samoyaut dans la Quinzaine littéraire (no 1052, p.13), dont j'aime bien la fin.
Qu'importe, pour moi ce sont de bien belles bergouniennes en perspectives, sans parler du plaisir de l'entendre sur France culture chez Veinstein !

Ai passé beaucoup de jours à écrire un texte sur l'histoire de l'abbaye de Thiron-Gardais. C'est long, compliqué mais intéressant.
Beaucoup de dates à vérifier, et de textes à lire (merci Gallica !). C'est le troisième "dossier patrimoine" que j'écris pour la revue Pays du Perche (après l'abbaye de La Trappe, le château de la Ferté-Vidame). Au départ je le fais pour l'argent, mais à chaque fois je me prends au jeu et me passionne pour cette histoire qui m'emmène toujours plus loin que prévu. Bien qu'étant athée et sans doute aucun sur l'existence de dieu (ailleurs que dans le cerveau humain) l'histoire des saints fondateurs est presque toujours étonnante.
Ici il s'agit de Saint-Bernard de Tiron (il est mort à Tiron en 1116, deux ans après avoir fondé l'abbaye d'aujourd'hui), qu'on appelle aussi Saint-Bernard d'Abbeville (né en 1046) ou tout simplement Bernard de Ponthieu.

Il y a eu dans ma vie pendant ces vingt jours, des animaux, des paysages, des gens, des repas, des amis, mais aussi de longs moments de solitude où il n'y eut rien de spécial sinon la répétition banale de choses déjà mille fois vécues. Tout ce qui m'arrive est ma vie. Quelques photos prises me rappellent simplement que je n'ai rien inventé et que mon temps passe.

... ... ...


.....


Souvent du mal à être là. L'impression de ne plus être accroché à ce monde dans lequel je ne me sens non pas étranger, mais spectateur, comme si les dés étaient joués pour moi, comme si j'y avais fait mon temps. Et pourtant je suis encore bien vivant puisque je n'y suis pas insensible et qu'il me provoque sensations, pensées agréables ou non, révoltes ou sentiments d'injustice...et qu'il y a encore deux ou trois choses, disons des projets, qui me tiennent encore à coeur.
J'ai aimé les bons moments pendant ces vingt jours : la visite de Rodolphe, ma virée à Paris avec Léa et Charlotte, (on a vu Bovines, un film étonnnant et original sur les vaches).



Mes filles ont apprécié la lecture d'Antonin Artaud par Muriel Richard Dufourquet. Il faut dire que la lettre du 27 décembre 1846 qu'Antonin Artaud écrit à Gilbert Lély, qui préparait un numéro de la revue belge Variétés, a disons...du répondant ! On la connaît sous le nom de La vieille boite d'amour KA-KA.
"[...] Car je n'ai, depuis longtemps, plus rien à dire sur l'amour. C'est un sentiment que j'ai cru avoir et comprendre, au temps où je me faisais sur la vie des idées fausses, car, en vérité, je n'y ai jamais trouvé d'amour, sauf en moi [...]"
...

Léa, en classe de 1ère S, m'a dit dans la voiture qu'elle en avait étudié un texte avec sa prof de français, tiré du Théâtre et son Double.

J'ai continué ma correspondance par mails ou cartes postales (que j'aime encore et encore envoyer), me suis bien amusé, parfois énervé, devant le cirque médiatique pour The artist (pas vu, ni Intouchables d'ailleurs), et bien sûr devant l'autre cirque, le grand, l'électoral !
Repère : Le Clézio, dernier prix Nobel de littérature français, n'a pas eu le millième de cette couverture médiatique en France. Cela montre combien bas est descendue la France.

Ai suivi avec attention les ennuis que Gallimard a voulu faire à François Bon pour la mise en ligne de sa traduction du Vieil homme et la mer.
Ai signé la pétition défendant le travail que fait François Bon depuis plusieurs années sur publie.net. Cette triste et facile attaque du requin contre le petit poisson, a servi néanmoins à montrer que les problèmes des droits d'auteur et du livre numérique sont loin d'être réglés.
La page Gallimard versus publie.net est à lire pour qui veut savoir ce qui s'est passé. (commencer par le bas pour lire dans l'ordre chronologique).
Cette affaire a d'autre part (je l'ai suivie quasimment en direct) montré l'extrème puissance et efficacité des réseaux sociaux et de l'Internet en général, tellement les réactions et commentaires en ligne, articles dans les blogs... furent rapides et nombreux, et il me semble efficaces, obligeant Gallimard à réfléchir (supprimer la demande de compensations financières...).

Je n'ai pas dit tout ce que j'ai oublié, tout ce qui ne peut s'écrire sans y travailler, et il me reste encore plein de photos que je n'ai pas utilisées.