2004 | JOURNAL DE JEAN CLAUDE BOURDAIS The Nogent le Rotrou Times ou Bourdaily on the Web |
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Vendredi 7 octobre 2005 | Hier | Avant hier |
À la recherche des Femmes d'Alger dans leur appartement...(Delacroix 8.) Les femmes d'Alger de Picasso, première version. On peut dire : durant l'hiver 1954, alors que débute la guerre d'Algérie, Picasso revisitera ce tableau de Delacroix, dont il tirera quinze toiles et deux lithographies portant toutes le titre de Femmes d'Alger. On pourrait dire aussi : Fin 54 et début 55, alors que Matisse vient de mourir (novembre 1954) , qu'il vient de rencontrer Jacqueline, Picasso est allé confronter son regard avec le fameux tableau. Il en sortira quinze toiles et deux lithographies portant le même titre de Femmes d'Alger. Exposées à la galerie Louise Leyris, elle furent acquises toutes les 15 par un collectionneur américain (Victor and Sally Ganz le 8 juin 1956 for 212,953 dollars). Le musée Picasso (Paris) possède seulement les dessins préparatoires à la plume que l'artiste a conservés. Ces deux versions ne sont pas identiques. La première donne à ce travail une valeur politique. La deuxième une étape importante dans le travail plastique d'un artiste. |
La première version correspond avec l'interprétation d'Assia Djebar (troisième partie de la nouvelle Regard interdit, son coupé, pages 259 à 263 dans le Livre de Poche) : Début du texte : " Alors que débutait à peine la guerre de libération en Algérie, Picasso va suivre, de décembre 1954 à février 1955, quotidiennement dans le monde des Femmes d'Alger de Delacroix. Il s'y confronte et bâtit autour des trois femmes, et avec elles, un univers complètement transformé : quinze toiles et deux lithographies portant le même titre. Il m'émeut de penser que l'Espagnol génial préside ainsi à un changement des temps." Fin du texte : " Je n'espère que dans la porte ouverte en plein soleil, celle que Picasso ensuite a imposée, une libération concrète et quotidienne des femmes." |
Cette version politique correspond aussi avec celle de Rachid Boudjedra qui dans son essai Peindre l'Orient), que j'ai déjà signalé, ne prend pas quatre chemins pour liquider Delacroix qui selon lui "portait sur cette réalité algérienne un regard de pacotille et de bimbeloterie. Nous sommes en 1834. Le canon tonne et Alger est à feu et à sang. L'intimité de ce gynécée, même si le tableau est -en soi- d'une très belle facture, a quelque chose de gênant et de faux". (Peindre l'Orient (Zulma, 1996). Dans une série d'articles récents, parus dans le quotidien algérien indépendant El Watan, il continue de descendre Delacroix et magnifier Picasso. Quelques extraits de ces articles suivent en regard des célèbres quinze toiles et des deux lithographies. Travail de romain de plusieurs nuits, avant que je puisse entrer dans la base américaine (ça fait très Crucey, je sais, là où mon père a travaillé à une certaine époque de mon enfance) du Picasso Project. Années 1954 et 1955. Un site aussi monstrueux que Picasso. Jamais vu ça. Allez vous balader dans LIFE, on a TOUT au jour le jour, avec liens et références. Là ça peut faire peur... Dans l'ordre chronologique voilà cette célèbre série, sans les dessins et études qui s'intercalent entre les tableaux (je les garde pour la page prochaine Picasso deuxième version). Toutes les images sont en couleurs : si certains tableaux sont dans les gris, c'est que Picasso a décidé de ne pas peindre en couleur ce jour-là... d'ailleurs Boudjedra en parle vous verrez comment il interprète cela. Certains passages me semblent exagérés ou de mauvaise foi, mais une telle fougue est rare. Est-ce là peut-être ce que l'on appelle de la littérature engagée ? En tout cas, qu'est-ce que Picasso n'a pas fait, on se le demande... Et qu'est-ce que le pauvre Delacroix prend pour son grade ! |
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Picasso super militant (avec cette série) contre la guerre d'Algérie à la Rachid Boudjedra, moi je veux bien si ça lui fait plaisir, mais on verra dans une prochaine page (Picasso, version 2) que cela peut se discuter, preuves à l'appui. Picasso qui " renverse la malédiction, fait éclater le malheur, inscrit en lignes hardies un bonheur totalement nouveau. Prescience qui devrait, dans notre quotidien, nous guider." à la Assia Djebar, j'en épouse l'espoir. " Comme s'il faisait aussi de cette dénudation non pas seulement le signe d'une " émancipation ", mais plutôt celui d'une renaissance de ces femmes à leur corps " : c'est elle-même qui prend la précaution de préciser : Comme si...C'est là la classe d'Assia Djebar, sa noblesse et toute son intégrité. Delacroix flic et suppôt du colonialisme comme le traite Rachid Boudjedra : non, je ne suis pas d'accord. Delacroix conservateur quant à l'image de la femme : sans doute, peut-être. Certes il a écrit dans son journal, comme le rappelle en notes Assia Djebar : " C'est beau ! C'est comme au temps d'Homère ! La femme dans le gynécée s'occupant des enfants, filant la laine ou brodant de merveilleux tissus. C'est la femme comme je la comprends ". Mais on sait que Delacroix ne s'est jamais vraiment investi dans une relation avec les femmes, ayant trop peur qu'elles le dérangent dans son travail de peintre. D'ailleurs l'année où il peint les Algériennes, il engage une gouvernante, compagne subalterne qui veillera sur lui jusqu'à la fin de ses jours. (Que dire alors de Renoir, lui colonialiste convaincu, nous l'avons déjà souligné, qui répond à Vollard le marchand : "...Les femmes d'Alger, il n'y a pas de plus beau tableau au monde. Comme ces femmes sont vraiment des Orientales...Celle qui a une petite rose dans les cheveux...Et la négresse ! C'est tellement un mouvement de négresse ! Ce tableau sent la pastille de sérail; quand je suis devant ça, je m'imagine être à Alger.". |