Mardi 8 mars 2005 résumé : Un jour, un type reçoit sa nièce avec ses amis, tous rouennais, parce qu'ils veulent voir Rogent le Notrou autrement que sur le web. Au cours de la soirée, ils se mettent à parler d'un tableau aussi impressionnnant qu'intriguant qui est au Musée des Beaux-Arts de Rouen, les Énervés de Jumièges, peint par Evariste Luminais d'après une vraie fausse légende, qui sera d'ailleurs définitivement démontée peu de jours après, gràce à un lecteur ami de Nantes, qui met à jour le mystère de la bougie. Ce tableau lui en rappele alors un autre du même peintre, la fuite du roi Gradlon, peint lui aussi d'après une légende, celle de la ville d'Ys. On y voit un père lacher sa fille dans des flots furieux sur les conseils de saint Guénolé, chevauchant à son côté, célèbre fondateur de l'abbaye de Landévennec, spécialisée aujourd'hui dans la fabrication des pâtes de fruits. Le lendemain, jour de la Saint Guénolé, une lectrice aussi attentive que bien intentionnée, s'inquiéte que Wanadoo parle de ce saint homme comme d'une femme (sainte Guénolé), et lui demande de mettre un peu d'ordre dans cette histoire de calendriers qui ne donnent pas tous le même saint à fouetter le même jour selon qu'on regarde sur wanadoo, le calendrier des postes, notre missel ou notre journal local favori. Qu'est-ce que c'est que ce désordre ? Alors qu'il était en train de découvrir que tous les saint(e)s et martyr(e)s sont répertoriés depuis longtemps dans un grand livre violent et sinistre, le Grand Martyrologe romain, un autre lecteur lui indique qu'à l'avant d'un autre bateau, un chat magnifique remplace la bougie des énervés. Cela lui suffit pour abandonner sa recherche et se laisser dériver avec les Marchands de fourrures descendant le Missouri de George Caleb Bingham. On ne voit ni les indiens cachés sur les berges, ni les les tours Martello que construiront plus tard les anglais, dont la plus célèbre est celle de James Joyce à Sandycove dans la banlieue de Dublin. Le type se remet au travail et continue ses recherches abandonnées sur le Grand Martyrologe romain. |
Les recherches sur le Grand Martyrologue romain avançent lentement mais sûrement.
Je veux savoir si on peut trouver l'enchaînement des différentes versions
ou publications qui ont eu lieu, depuis le pape Saint Clément qui vécut immédiatement après les apôtres,
et qui le fut le premier à prendre son pied à recueillir les noms et les actes des martyrs
et à décrire leurs atrocités subies...jusqu'à aujourd'hui, où avec les différents ajouts annuels,
on dépasse les 40.000 noms. Ce livre, inconnu de moi encore il y a une semaine, m'intéresse et commence à m'envahit la tête et m'obséder : j'y vois la plus sinistre des cartes du monde, celle des violences et persécutions (même si celles qui sont répértoriées là, ne sont que les religieuses bien sûr). Les Martyrologes récents montrent particulièrement bien d'ailleurs toutes les tensions internationales de ces dernières années. Au bout de quelques nuits, je peux enfin dresser un premier état des lieux : - Des premiers siècles de l'Église, il ne reste plus que quelques fragments du martyrologe d'Eusèbe de césarée, traduit en latin par saint Jérôme. - Il en reste, à droite et à gauche dans le monde et dans les caves du Vatican plusieurs, entiers , dont certains sont décrits exceptionnels: * -le martyrologe de Bède avec des additions postérieures de Florus, *- Le martyrologe de Raban Maur, *- le martyrologe de d'Adon, le martyrologue de Wandelbert, *- Le martyrologe d'Usuard *- les martyrologes de Nevelon, de Notker, de Bellin, *- le martyrologe de Maurolycus, *- le martyrologe de Molanus (Van der Meulen) Devant l'ampleur du désastre, j'abandonne tout de suite l'idée de m'intéresser aux martyrologes protestants (car ils existent, comme ceux de Fox, de bray et de Clarke), et décide donc de commencer dans l'ordre chronologique, à savoir celui d' Eusèbe de Césarée. |
Le cas d'
Eusèbe
(de Césarée de Palestine) (début du IVè siècle) est assez vite réglé. Il a une réputation épouvantable,
et la plupart de ses textes (écrits en grec ancien) passent pour remplis de contradictions, d'incohérences, de " tripatouillages, fraudes et bourdes...".
On reproche à cet évêque son manque de crédibilité car il ne dédaigna pas être l'ami et le conseiller
de l'Empereur Constantin, une sorte de " Clovis oriental " qui n'hésita pas à massacrer sa famille,
" sous l'inspiration de Dieu ". Il en écrivit d'ailleurs une histoire
trop élogieuse et partiale pour être prise au sérieux.
Il a écrit de nombreux ouvrages encore disponibles aujourd'hui , (une quinzaine sont traduits en français) mais il y confond histoire et propagande et l'objectivité n'y est pas son fort. Par exemple, dans son histoire de l'Église il déclare carrément : « Mais nous mentionnerons généralement dans cette histoire uniquement les événements qui peuvent être utiles d'abord à nous-mêmes, ensuite à la postérité. » (HE, VIII, 2, 3). je ne sens pas trop ce monsieur, aussi je ne creuse pas sa vie, ni son œuvre. On peut trouver plus méchant que moi dans le portrait : " Eusèbe de Césarée : Qui a dit tout et son contraire, frotté les pompes de Constantin et de tous les puissants de son temps. Sa chronologie ne tient souvent pas la route. Il s'est fait tant d'ennemis en son temps qu'il n'y a que sur les textes qu'il cite, lettres surtout, qui étaient conservées dans les bibliothèques religieuses de l'époque, qu'on peut être sûr : ses ennemis n'auraient pas manqué de lui mettre sous le nez qu'il inventait, preuve à l'appui. Pour le restant, il faut sans cesse recouper." Heureusement, sur le site exceptionnel de la banque de microfilms numérisés de la Bibliothèque municipale de Valenciennes, on trouve un document non moins exceptionnel puisqu'il est le plus ancien de la collection. Il date du VIII è siècle. |
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Ci-dessous le folio 2 en question. |
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Les mises en page sont variées, on voit sur certaines pages des trous dans le parchemin, la transparence de certains folios. C'est une merveille... |
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Et vous avez vu (lu) les couleurs ? |
Bon, mais je m'égare, ce ne sont que des chroniques, ce ne sont pas des martyrs. Rappel : Un martyr est celui qui a subi un martyre. Le martyr est la victime, le martyre le supplice lui-même. "Le crime a ses héros, l'erreur a ses martyrs" (Voltaire); "Le martyre est une sublimation" (V. Hugo). Au féminin, une martyre est une femme qui a subi un martyre, (ce n'est donc pas son mari qui au mieux ne peut être qu' un martyr). On a salué hier Thècle, première martyre du christianisme. je suis au martyre, Il me faut des supplices ! Mais il se fait tard et Lautréamont a raison : "Le sommeil est une récompense pour les uns, un supplice pour les autres. Pour tous, il est une sanction" (Poésies) |