Froid de canard dans la banlieue.
Les deux filles contentes et fières de marcher à l'école, ce n'est pas souvent, avec leur père...et qui deviennent ainsi "normales" comme les autres, ce qui me rend aussi "normal" (pour une fois)...
Elles m'apprennent où il faut changer de trottoir pour éviter les gros chiens qui aboient à chaque passage en se ruant sur la grille...
C'est une matinée un peu spéciale car il y a une exposition de travaux d'élèves, une vente de jouets devenus pour et par les uns usagés et qui pour d'autres (c'est écrit "pour les déshérités"), seront les jouets nouveaux du prochain Noël ...
Je discute un peu avec "le Maître" de Charlotte. Il les a fait travailler sur les fossiles, l'origine de la Terre, les temps géologiques...
J'apprécie, car ce n'est pas souvent le cas, la simplification faite sans avoir dit de conneries ou d'erreurs graves (car mettant en tête souvent des images mentales fausses dont il sera difficile de se défaire, voire que l'on gardera toute sa vie). Charlotte m'entretient sérieusement des Trilobites (dont elle a fait une superbe réplique en pâte à modeler)et autres Dinosaures...

Une autre classe avait travaillé sur l'autoportrait. Je ne peux m'empêcher de penser à ceux d'Artaud.

je suis attiré sur le trottoir en passant devant une civette par la une de Libération et son titre : La blog génération De plus en plus d'internautes tiennent leur journal sur la Toile. Ils contestent et complètent les médias traditionnels, eux aussi séduits par le phénomène. A l'intérieur 3 pages complètes, dont tous les articles sont en ligne ! Perturbateurs Editorial : signé Jean-michel Thénard, Le monde selon blog , article de pascal Riché (a Washington) et Frédérique Roussel, Liberation.fr défricheur,encart non signé, Les limites à ne pas dépasser , article de Aléxandre Lévy, Pourquoi ils tiennent leur journal , mini interviews de 5 "bloggeurs", dont un de Florence trocmé, responsable de l'excellent Poezibao découvert grâce au journal littéréticulaire de Berlol «Un contre-pouvoir aux médias» , interview par Christophe Alix de Florence Le Cam qui étudie ce phénomène à l'université Laval,et A savoir, colonne de brèves ...

Savoureux de lire que "certaines sociétés n'apprécient pas les journaux irrévérencieux de leurs salariés"... J'espère simplement que ces derniers (et j'en suis sûr) ne se laisseront pas intimider et trouveront les parades nécessaires...effrayé aussi de voir comment et combien les médias cherchent à récupérer le phénomène qui, entre autres raisons, provenait de la nécessité de faire et donner une autre information que celle qu'ils se contentaient, avec les gens de pouvoir, de donner en pâture aux lecteurs qu'ils prenaient visiblement pour des cons....

S'il y a une chose au moins que les blogs ont prouvé, pour ceux qui en lisent régulièrement un certain nombre, c'est qu'il y a encore beaucoup de personnes qui ne sont pas dupes, résistent aux discours à la mode, ne gobent pas tout ce qu'on leur dit, et le moins qu'on puisse dire, ne sont pas connes.
Les articles récents du Nouvel Obs (cf. 15 novembre), de Libé etc qui fleurissent en ce moment, en essayant de faire passer les blogs comme une mode contre une autre, montrent bien l'urgence qu'il y a à les banaliser pour mieux les neutraliser.
Et là je me marre.
Le succès médiatique des blogs est-il dangereux ? Je ne crois pas. Il va rassurer ceux qui ne les pratiquent pas, ne les lisent pas, mais qui en causaient déjà avec dédain ou moquerie, par principe ou par "oui-dire", et les assurer d'être dans le bien-pensant et le politiquement correct, ceux que "un autre discours" que le leur ou qu'officiel, dérange.
Dire qu'il y en a déjà cinq millions dans le monde ("oh là là c'est beaucoup ! c'est inquiétant...") ne sert à rien et ne noiera pas le poisson.
Ce n'est qu'un chiffre et on peut lui faire dire ce qu'on veut. Cela fait moins d'un pour cent des terrestres. Il y a plein de blogs non déclarés, et puis il y a les réseaux entre les blogs, comme des niveaux de lectures, et la partie cachée de chaque blog codée ou non etc.... Cinq millions ! Mais j'en voudrais plus encore, pas pour les lire (c'est humainement déjà aujourd'hui impossible) mais pour savoir qu'ils existent.
Je suis convaincu en effet que si chaque individu de cette planète faisait son journal chaque jour, prenait le temps de faire une pose, de se demander ce qu'il retient de sa journée, ce qu'il a à en dire ou qu'il a envie de faire partager ou faire savoir aux autres, à un autre, la qualité de la vie en serait totalement transformée, et certains pouvoirs vacilleraient sans doute.
Libé fait référence avec son titre sans doute à la Beat generation. Il y aurait une Blog generation comme il y a eu une Beat generation ? Oui et alors ? For-mi-da-ble ! J'espère que la première nous amènera autant de bonnes choses que la dernière.

Fin de soirée au restaurant en famille. Un endroit chaud et sympathique où nous avons tous choisi ce que l'on aime : Charlotte des frites, Léa des spaghettis à la Bolognaise, Pascale une salade au chèvre chaud, et moi des moules marinières. Comme d'habitude, on laissera après notre passage un véritable souk, nappes déchirées, dessins et gribouillages partout...

Seule ombre à l'évènement : les glaces servies dans ces affreux pots résidus des bondieuseries disneyques que je hais tant, depuis toujours, ce laminage systématique de la tête des gamins, imposé du lever au coucher. C'est moche, c'est vide, c'est commercial, pourri, triste.
Léa ne comprend pas ma crise, Charlotte résiste plus, c'est bon signe.