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samedi 13 novembre 2004.
Il faut prendre le taureau par les cornes.
Faisons ce que l'on n'a pas l'habitude de faire.
Lever tôt alors que je pourrais me lever tard.
Allons où je ne vais jamais ou presque : chez le coiffeur qui est à la fois ma coiffeuse et ma propriétaire.
Oui oui... très court s'il vous plaît, pour bien sentir l'hiver.
Oui j'ai dormi peu mais mal.
Achat de fruits de mer sur le marché pour l'invitation faite à Edouard et Martine ce soir.
Une première à Nogent le Rotrou depuis mon arrivée (je parle de l'invitation , pas des fruits de mer). Suite de premières. Est-ce possible ?

" Un réflexe ou un tic ou bien la première fois. La première fois que je le fais la première fois que je me regarde faire la première fois qu'est-ce que ça me fait la première fois." (Certainement pas, Chloé Delaume)

Je sais qu'on peut bailler, raisonner ou se fermer comme une huître et qu'en Bretagne chien enragé peut avaler une huître, mais je les "adore" depuis que je m'en souviens.


illustration de Jean-Baptiste Oudry,(que je préfère à celle de Gustave Doré) "Parmi tant d'Huîtres toutes closes,
Une s'était ouverte, et bâillant au Soleil,
Par un doux Zéphir réjouie,
Humait l'air, respirait, était épanouie,
Blanche, grasse, et d'un goût, à la voir, nonpareil.
D'aussi loin que le Rat voir cette Huître qui bâille :
Qu'aperçois-je ? dit-il, c'est quelque victuaille ;
Et, si je ne me trompe à la couleur du mets,
Je dois faire aujourd'hui bonne chère, ou jamais.
Là-dessus maître Rat plein de belle espérance,
Approche de l'écaille, allonge un peu le cou,
Se sent pris comme aux lacs ; car l'Huître tout d'un coup
Se referme, et voilà ce que fait l'ignorance.
"

" A l'intérieur l'on trouve tout un monde, à boire et à manger : sous un firmament (à proprement parler) de nacre, les cieux d'en dessus s'affaissent sur les cieux d'en dessous, pour ne plus former qu'une mare, un sachet visqueux et verdâtre, qui flue et reflue à l'odeur et à la vue, frangé d'une dentelle noirâtre sur les bords.
Parfois très rare une formule perle à leur gosier de nacre, d'où l'on trouve aussitôt à s'orner.
"
(F. Ponge, Le Parti pris des choses, 1942)

Mon envie d'huîtres aujourd'hui cacherait-elle un manque des plaisirs de la chair, de l'ingrédient épicé...?

" Nous nous mîmes à table où j'ai appris à ces filles à manger des huîtres en leur donnant l'exemple. Elles nageaient dans leur eau. Armelline après en avoir mangé cinq à six dit à Emilie qu'un morceau si délicat devait être un péché... Elles étaient surprises de se trouver de l'appétit plus vif après avoir mangé seize morceaux. Armelline me paraissait devenir amoureuse... " (Casanova)

On apprécie sa recette (Huîtres à la Casanova) :
"Pour trois personnes
Prendre cent huîtres.
En faire deux parts égales.
Utiliser la première moitié en hors d'oeuvre, garder le reste pour le dessert.
Après six huîtres chacun, ingurgitées en amuse-gueule, prendre les autres bouche à bouche comme pigeonnes font aux pigeonneaux.
Cet exercice, qui ouvre l'appétit, a reçu l'approbation de la supérieure du couvent où loge Ermellina.
Après un repas exclusivement accompagné de champagne, les huîtres suivantes peuvent s'égarer dans les corsages où vous pourrez allez les picorer, ce qui ajoute aux huîtres ce piment qu'elles n'ont pas naturellement. Si l'eau s'en répand sur les seins vous pouvez aller l'y téter - ce qu'Ermellina appelle faire l'enfant."

Le baiser de Casonova, le " baiser de l'huître " c'est quelque chose ! Sade avec ses gibiers et sa volaille pour "restaurer les forces des libertins" peut aller renfiler sa chemise.
Chez Casanova, il s'agit de tout autre chose.
Ce fameux baiser consistait à humer l'huître dans la bouche de l'objet aimé, à la passer de langue à langue et à la déguster ainsi, dans toute sa fraîcheur. Avec cela, il fallait boire des vins blancs, plus distingués que les rouges. (Jean-Luc Hennig)

Dans les scènes galantes de Brakenbourg, les écailles d'huîtres qui parsèment un plateau gisant au sol, en bas à gauche du tableau " évoquent avec discrétion" l'invitation à la luxure.
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Je connais le trouble de Michelet :
"Quelle adorable blancheur ! non c'est candeur que je devrais dire : -virginale ? non ; c'est bien mieux ; les vierges et les petites filles ont toujours, si douces soient-elles, un peu de jeune verdeur. La candeur de celle-ci serait plutôt celle de l'innocente épouse, si pure, mais soumise à l'amour"

Boileau, parce qu'elle se ferme (comme une huître) la prend pour une paresseuse :
"Les salaires sont deus à celuy qui travaille. S'il ne vit de son suc comme une huître à l'écaille" (Satyre X)

Maupassant dans Bel ami est plus voluptueux :
"Les huîtres d'Ostende furent apportées, mignonnes et grasses, semblables à de petites oreilles enfermées en des coquilles, et fondant entre le palais et la langue ainsi que des bonbons salés. "

Edouard est citron, Martine est vinaigre.
.
Huître et citron, Guillaume Fouace, 1837-1895 Nature morte, début XVIIème Brunelle de Neuville, 1852-1941
Trop bien éduqués on n'en a pas mis par terre comme dans les grands déjeuners
détail de déjeuner d'huitres ,
		 Jean-François de Troy, 1734, Chantilly, musée Condé
détail de déjeuner d'huitres , Jean-François de Troy, 1734, Chantilly, musée Condé

Le Souper Fin, Jean-Michel Moreau le Jeune, 1781, détail Il manquait sans doute une femme pour que la soirée dure plus longtemps.
Même si la conversation fut des plus agréables.

"- Ah ! vraiment ? vous êtes amateur ?
- Oui, monsieur ; comme vous, sans doute ?
- Moi ? je voyage exclusivement pour les huîtres.
- Bravo ! nous pourrons nous entendre. Je me mets absolument à votre service.
- Parfait ! Avalons encore quelques-uns de ces mollusques et nous causerons. - Garçon ! apportez-nous encore quatre douzaines d'huîtres.
"
C'est déléctable, on s'en lêche les babines. C'est de Georges Sand encore (Salut Patrick !)(Le gnôme des huîtres, tiré du recueil Contes d'une grand'mère, 1875, publiés à Paris par les Editions R. Simon en 1936 avec une introduction de L. Ville). Pour les fous du "tout de suite" (avec une bouteille de Sauterne par exemple) .

Edouard Martine adore la salade de mâches.

Il était très tard, ma poubelle ressemblait à celle de Broodthaers, même si à la place des moules, c'était des huîtres, des carapaces de tourteau, de crevettes et autres bulots...et les cadavres d'entre deux mers, de Chardonnay et de Saumur Champigny...
Ma tête commençait à ressembler aux fonds marins de Miquel Barcelo, où dans une sorte de maelstrôm, on ne sait plus si on voit le fond de la mer, le sable, les courants d'algues et d'eaux, et si les aspérités sont des coquilles d'huîtres, d'oursins ou autres coquillages. J'étais à l'heure où j'étais fortement aspiré par les trous noirs où je tentais de m'accrocher comme à des îlots...
Marcel Broodthaers moules sauce blance, 1967. Miquel Barceló :
 Bodegón avec protozoaires et trous noirs, 2003, extrait.

" Cette Fable contient plus d'un enseignement. Nous y voyons premièrement :
Que ceux qui n'ont du monde aucune expérience
Sont aux moindres objets frappés d'étonnement :
Et puis nous y pouvons apprendre,
Que tel est pris qui croyait prendre." (La Fontaine, Le rat et l'huître).
"